Traduire
Télécharger en PDF

L' empire du mal

Whatsapp
email
Linkedin
Facebook
Twitter
Partager sur
11 septembre, 2018
Tribune libre
Jean-Luc Baslé


« L'empire du mal », c'est ainsi que Ronald Reagan avait qualifié l'Union soviétique. L'URSS n'est plus mais il y a un nouvel empire du mal : les Etats-Unis. Le monde vit sous la menace d'un empire maléfique depuis la révolution bolchévique de 1917, à l'exception d'une courte pause entre décembre 1991 et février 1992. En effet, c'est en 1992 que le Pentagone a déclaré au monde qu'il ne tolérerait plus aucune remise en cause de l'hégémonie mondiale des Etats-Unis. Un des conseillers de Georges W. Bush, sans doute Karl Rove, a clairement exprimé cette nouvelle réalité lorsqu'il a déclaré « Nous sommes un empire maintenant et lorsque nous agissons, nous créons notre propre réalité » (1). C'est à partir de ce moment que la descente aux enfers a commencé. Comment cela finira-t-il ?

 

 

Les Etats-Unis ont tué trois millions de personnes au Vietnam, lors d'une guerre que le Pentagone savait pourtant inutile. Ils ont tué 655 000 personnes en Irak, entre 2003 et 2006, selon le journal britannique The Lancet (2). Saddam Hussein n'avait pas d'armes de destruction massive. Pourtant Condoleezza Rice, Secrétaire d'Etat de Georges W. Bush, a évoqué un « nuage de champignons survolant une ville américaine », afin de convaincre les Américains que la menace était bien réelle et que l'invasion était justifiée. Madeleine Albright, Secrétaire d'Etat de Bill Clinton, a déclaré, quant à elle, que la sécurité des Etats-Unis valait bien la peine de tuer un demi-million d'enfants irakiens. La Libye a été détruite en 2011. Sous Muammar Kadhafi, personnage certes singulier, le revenu par habitant de ce pays était supérieur à celui des autres Etats du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord. Selon le FMI, depuis la disparition du Guide, ce revenu a été diminué de moitié (3). Le Yémen est un désastre humanitaire et l'Iran pourrait être le prochain pays sur la liste. Le coût économique de ces guerres est astronomique : deux billions de dollars, sans parler des coûts humains, mais comme l'on dit aux USA « les décès sont là-bas… » (4). Ces conflits ne résistent pas à l'épreuve de la raison.

Le 5 septembre dernier, le New York Times a publié une tribune libre anonyme critiquant Donald Trump, une énième charge visant à le briser. Ce pamphlet, soi-disant écrit par un fonctionnaire de la Maison-Blanche, stigmatise l'amoralité et le comportement erratique du Président américain et dit craindre pour « la santé de notre République », en rassurant néanmoins le lecteur : « il y a des adultes dans la salle. »

Même si l'auteur s'en défend, il s'agit clairement d'un appel déguisé visant à destituer Donald Trump. Certes, il est imprévisible, mal préparé à la tâche et a commis de nombreuses erreurs, mais pourquoi les Américains ont-ils voté pour lui ? Peut-être à cause des échecs de ses prédécesseurs et des politiques mises en œuvre par l'élite de Washington depuis 1992 ? Alors que celle-ci estimait que le moment était venu pour les Etats-Unis de diriger le monde puisque tel était son destin manifeste. Donald Trump a raison de vouloir faire la paix avec la Corée du Nord, un pays aplati par les bombes américaines, et d'engager des discussions avec la Russie, puissance nucléaire égale à celle des US.

Cette tribune anonyme n'a aucun sens, car loin de préconiser un changement de politique, elle encourage de manière subliminale la poursuite des politiques du passé, celles-là mêmes qui ont amené Donald Trump à la Maison-Blanche. Paul Craig Roberts, ancien Secrétaire adjoint au Trésor de Ronald Reagan, pense que cet écrit est un faux (5). Diana Johnstone est du même avis (6). Ils ont peut-être raison, le New York Times est un opposant déclaré du Président.

Cet événement vient couronner, pour ainsi dire, une campagne anti-Trump qui a commencé avant son élection. Robert Mueller, ancien directeur du FBI et procureur spécial nommé par le procureur général, Jeff Sessions, pour enquêter sur l'ingérence présumée de la Russie dans la campagne présidentielle de 2016, n'a pas encore trouvé de preuve, près d'un an et demi après le début de l'enquête. Le « House Comitee » a conclu qu'il n'y avait pas d'ingérence. Pourtant la croisade se poursuit, comme le montre les invectives lancées contre Donald Trump après sa rencontre avec Vladimir Poutine à Helsinki. John Brennan, ancien directeur de la CIA, a parlé d'un comportement de traitre. A-t-il oublié que Barack Obama avait voulu « réinitialiser » la relation avec la Russie de manière pacifique ?

La mort récente de John McCain, utilisée pour diffamer une fois de plus Donald Trump, montre à quel point "le Beltway" est tombé bien bas. En vérité, l'éloge de McCain est une insulte aux officiers et marins américains, ainsi qu'aux prisonniers de guerre du Vietnam, sans parler des survivants et des réfugiés des guerres du Moyen-Orient des dix-sept dernières années. Quoique l'on puisse penser de Donald Trump les calomnies ne servent ni les Etats-Unis, ni la vérité. Qu'est devenu ce pays ?

Dans son dernier livre, « The American Trajectory : divine or demonic ? », David Ray Griffin retrace les origines et la nature de l'empire américain. Selon l'auteur, si rien n'est fait pour renverser la politique hégémonique mise en place en 1992, les Etats-Unis deviendront une « démocratie autoritaire » ou connaîtront une dépression économique de dimension apocalyptique, voire les deux. Cela pourrait aussi se transformer en un scénario de guerre nucléaire si les généraux russes, fatigués d'être humiliés par les Etats-Unis, menacent de réagir avec toute leur puissance militaire. Et, l'insolente gaminerie washingtonienne criera pouce pour avoir la vie sauve...

 

Jean-Luc Baslé

 

 

(1) https://www.nytimes.com/2004/10/17/magazine/faith-certainty-and-the-presidency-of-george-w-bush.html

(2) https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736%2806%2969491-9/abstract

(3) https://www.imf.org/external/pubs/ft/weo/2017/02/weodata/index.aspx

(4) https://www.cbo.gov/publication/52450

(5) https://www.paulcraigroberts.org/2018/09/06/i-know-who-the-senior-official-is-who-wrote-the-ny-times-op-ed/

(6)http://www.ronpaulinstitute.org/archives/featured-articles/2018/september/07/new-york-times-undermining-peace-efforts-by-sowing-suspicion/

(7) https://www.amazon.com/American-Trajectory-Divine-Demonic/dp/0998694797

(8) https://www.amazon.fr/Democracy-Incorporated-Managed-Inverted-Totalitarianism/dp/069114589X

 

Tags:
etats-unis